Ravin de l’oued Melah, thalweg sous le pont H 519.37, à faible distance au sud de la confluence d’un oued tributaire qui descend de l’ouest, du djebel Bou Khoubza.
Le site 232 comprend le troisième pont - aqueduc composé de trois étages surmonté d’une conduite forcée, longue de 55.35 m (souvent improprement nommée siphon ou siphon inversé utilisé dans les canalisations d’évacuation d’eau). Le pont a soutenu la conduite forcée qui descendait vers le bas et gravissait les pentes de l’oued Melah avec une flèche de environ 24 m. Les trois étages atteignent une hauteur de 30.60 m et de 31.20 m y comprise la conduite composée de blocs cubiques (entre 59-62 cm de côté = env. 2 pieds romains) et des blocs en forme de parallélépipède (98-102 cm de large) de calcaire blanc creux à l’intérieur (Ø 25-27 cm) qui sont équipés de joints mâle et femelle. Certains blocs ont un ou deux évents (colliviaria: Vitr. 8.6.6). Un dessin de Carton documente comment ces blocs, aujourd’hui disséminés sur la rive est de la rivière, étaient disposés en alternance avec et sans évent, comme c’est le cas dans certaines conduites en Asie Mineure et en Palestine.1
Le siphon de Patara en Lycie (Asie Mineure) a préservé les blocs cubiques sur le pont.2 Les ouvertures des évents étaient bouchées avec de petits bouchons en pierre liés avec du mortier. Les prises d’air ont été utilisées pour l’aération, pour évacuer les bulles d’air qui pourraient réduire le débit d’eau, ou, selon une hypothèse récente, pour éviter des coups de bélier ou pour amortir des ondes de pression dans la conduite (Schwarz 2008). La conduite forcée partait d’un bassin circulaire de chasse, mal conservé, et aboutissait dans un bassin de fuite (site 233) mieux conservé et des mêmes dimensions, les deux bassins ayant une dénivellation de maximal du bas-fond de 0.38 m, nécessaire pour générer l’écoulement de l’eau en correspondance avec le principe des vases communicants.
Le bassin de chasse se trouve à 2434.248 m à l’est du bassin de captage. Les piles du pont ont une base solide en conglomérat avec les voûtes souterraines faisant corps avec le second étage des arches, parementé de blocs équerrés (lapide quadrato: Frontin. aq. 124.1) là où la structure est en vue. De même les piles de l’étage supérieur sont composées d’un petit noyau intérieur presque carré (environ 1 x 1 m) en caementicium parementé des quatre côtés de blocs parallélépipédiques bossés longs de 0.25 à 1.07m et hauts de 0.29 à 0.64 m. Pendant la construction ces blocs constituaient le ‘coffrage perdu’ du caementicium. La ciselure périmétrale de beaucoup de blocs présente trois sillons parallèles encadrant la bosse. Ce détail technique et esthétique se manifeste dans l’aqueduc seulement dans le grand appareil du pont site 232, il manque dans celui des ponts des sites 213 et 218. Les arches sur les piles en conglomérat sont jetées sur des coffrages qui reposaient sur les dalles saillantes à la retombée de ces arches. Les arches ne sont pas constituées de voussoirs sans liant, comme dans les trois ponts successifs. La variation s’explique du fait que le conglomérat des arcs permettait une liaison plus robuste avec l’ancrage de la rangée de blocs de la conduite forcée. Évidemment, le positionnement de la canalisation sur l’extrados des voussoirs n’a pas été considéré comme une construction capable de résister à la poussée de l’eau descendant sur une pente de 21%. La transition entre les différents appareils est une faiblesse structurelle du pont-aqueduc (v. inf. ponts 213 et 218). Les dalles saillantes à la retombée de ces arches sont pourvues d’un trou étroit et oblong de levage, creusé au centre de gravité de la face supérieure. La conduite forcée perdait de l’eau, comme en témoigne le dépôt de calcium sur quelques piles.
Le noyau des arches est en conglomérat de pierres de forme allongée, disposées en assises horizontales entre les rouleaux des arches et en pose radiale pour former le rouleau des arches. Les bandeaux des arcs sont des moellons de calcaire couleur brune de la même qualité que le calcaire utilisé pour le conglomérat. La butée entre les voûtes contigües des arches est en blocs de calcaire disposés en rangées horizontales. Une partie du thalweg de l’oued Melah est pavée de dalles en aval, au sud du pont, cf. le perré site 197.
Nous proposons ici une restitution du pont en trois étages, la partie centrale a été détruite, probablement à cause du vent, même si l’étage médian était bien ancré: le pont s’amorce déjà, en souterrain, à la naissance de la première pile bossée de l’étage supérieur. Les tempêtes du nord-ouest (mistral) peuvent être particulièrement violentes. Les établissements antiques et modernes de la région, à la fois ruraux et urbains, sont en fait conçus pour être à l’abri des vents persistants du nord-ouest. Frontinus (aq. 121) a bien vu le risque des tempêtes (vi tempestatium) pour les arches des aqueducs, surtout quand celles-ci sont construites sur une pente et / ou sur le lit d’une rivière, en fait trois conditions qui s’appliquent au pont du site 232: aut vetustate aut vi tempestatum eae partes ductuum laborant quae arcuationibus sustinentur aut montium lateribus applicatae sunt, et ex arcuationibus eae quae per flumen traiciuntur…
[1] Hodge 1995, 38-40, fig. 15-7.
[2] Hodge 1995, 34, fig. 12; Grewe 1992, 76-7, 82.
Carton 1897, 58:
Carton 1897, 50 et fig. 18:
de Vos 2004, 20-22.
de Vos 2000, 31, 32, fig. 46.1-14.
de Vos, Attoui and Battisti 2013, 29-32.
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