Toponyme

Aïn Azouza / Ezousa, Henchir Oued Soussa

Emplacement

36.43° N, 9.145° E, h. 535 m.

Le mamelon couvert de maquis méditerranéen est entouré à l’ouest et au nord d’un champ labouré de terre noire, à l’est et au sud des berges de l’oued Soussa. Le terrain incultivé du mamelon sur lequel les structures sont disposées, monte légèrement vers le nord (côté djebel Gorraa) et au sud (vallée de l’Arkou) il confine à un champ labouré sur les côtés nord, ouest et sud, tandis que le côté est dévale par une pente de 10% en l’oued Soussa (ou Zouza). Les sites (aujourd’hui détruits) 26 et 27 sur le sommet de la colline à l’est de l’oued Soussa, appelé «bourg» par Carton (1895, 246) et site 29 sur le sommet de la colline au sud de l’oued Soussa faisaient probablement partie de l’agglomération rurale du site 5. Le site 5 est situé entre deux sources: Aïn Aziza (0.3/0.4 km) et Aïn Zaroura (maintenant Bint al-Aryen) (0.3/0.4 km). Le site 5 est interrompu par deux bandes de terre labourée, l’un au sud du torcularium central du site et l’autre, plus large, au sud de l’église.

Le sol noir entourant le site sur le côté ouest n’est pas drainé. L’oued Soussa, sec en été, se transforme en hiver en rivière à cascades et cause ainsi un ruissellement direct dans l’oued Arkou. De nombreux arbres (peupliers et cyprès) poussent dans le marais au confluent de l’oued Soussa et des eaux qui proviennent de l’Aïn Aziza. Dans la section nord du site on a tenté, sans succès, de creuser un puits aux environs de 1993. L’état de conservation du site est bon, à part les fosses creusées en 1994 par des clandestins à la recherche d’objets destinés au marché d’antiquités. Leurs activités se sont poursuivies après la découverte faite en 1994 et 1995. En dépit des actions illégales deux chapiteaux corinthiens, une base de pilastre et des pilastres cannelés sont toujours en place (1998). Au moment de la première prospection, on a trouvé deux blocs en calcaire figurés avec les bustes de Juno Augusta et Mercure, tout juste découverts, mais encore in situ. Les blocs sont enlevés et transportés dans le dépôt de Dougga. De nombreux blocs sont déplacés de leur position d’origine et réutilisés pour servir à traverser l’oued ou comme élément anti-érosion, ou à renforcer le bord du tell (à l’est de l’église).

Une ferme moderne avec un gourbi et une petite oliveraie se trouvent près de la source.

Description

Agglomération rurale (deux fermes avec au total cinq presses, une église avec enceinte, deux bâtiments sans particularités) située sur un mamelon dont le sommet s’est formé par suite de l’effondrement et de l’enterrement des structures antiques. Les bâtiments sont alignés en une rangée le long de l’oued Soussa, avec, chacun, une orientation légèrement différente. Les édifices couvrent une superficie de 210 m (axe nord-sud) à 50 m (axe est-ouest).

Description du nord au sud

Un torcularium long et étroit, construit avec des blocs équarris réutilisés; un deuxième torcularium de dimensions considérables (34 x 17 m), un bâtiment (25,7 x 8,7 m), une église (14 x 9 m) (construite avec des blocs enlevés du temple site 29) et encore un autre bâtiment. Chaque bâtiment a une orientation différente et un ‘auréole’ autour de blocs disposés sans ordre apparent. Nous ne pouvons pas connaître la période à laquelle ces blocs ont été placés: ceux à l’est de l’église suggèrent une enceinte destinée aux rassemblements religieux et/ou d’affaires.

Torcularium du nord. Le bâtiment allongé (11 x 4,2/4,4m) situé dans la partie nord du site contient beaucoup de blocs équerrés réutilisés, comme par exemple le montant pourvu d’une encoche en L (pour le logement de la sera, qui barrait la porte à l’intérieur horizontalement) qui a été réutilisé comme prolonge de la maie de la presse, ce qui explique la présence du canal oblique creusé dans le calcaire près de l’encoche en L. Le bloc d’ancrage énorme déjà ébréché avant d’être placé dans le mur d’enceinte en petit appareil semble également être réutilisé. L’opus vittatum du petit pan de mur (1,4 m) préservé sur le côté court nord du bloc d’ancrage se caractérise par une texture relativement grossière. Le reste du mur est formé d’orthostates. La dalle en grès rose (provenant de la carrière d’Uchi Minus), qui est normalement utilisée pour la maie de la presse (ara) devant le bloc d’ancrage, a été soulevée. D’autres fragments de la même pierre dispersés dans le voisinage devraient faire partie de la maie, en dépit de l’absence d’une rigole. Cependant, il y a aussi un petit fragment de maie avec une rigole circulaire. Le contrepoids qui appartenait au torcularium est probablement un élément qui est déplacé et déposé à une petite distance au nord du torcularium, même si les mesures du contrepoids ex situ à l’ouest de l’église coïncideraient mieux avec ceux du bloc d’ancrage du torcularium central resté in situ. Une fouille clandestine en 2008 dans le secteur ouest du torcularium a mis au jour un chapiteau à trapèze en calcaire blanc. Au sud du torcularium on observe une meta en calcaire nummulithe striée dans la partie conique. En partant de la documentation des metae dans les huileries de Volubilis et de Madaure on peut supposer que la meta pourrait avoit été utilisée pour le compactage des olives (de Vos, Andreoli, Attoui 2011, 138-9, fig. 14 Du005). La meta ne peut pas être considérée comme indice de céréaliculture. Dans site 5 on a trouvé également quatre fragments de molae manuales: deux meules courantes en lave rouge de Mulargia et en calcaire poreux/fossilifère gris, et deux autres indéfinies en calcaire nummulithique blanc et en lave noire. Les deux exemplaires en lave étaient importées, les autres deux étaient réalisées en roche locale. Les molae manuales font témoignage de moulure de céréales pour la consommation locale. Le torcularium n’était pas isolé, il était flanqué à l’ouest par une autre structure, dont chronologie et fonction sont inconnues.

Torcularium dans la partie centrale du site. À environ 250 m du torcularium nord on en trouve un deuxième, plus monumental et complexe, également comportant de blocs équerrés réutilisés, comme celui portant le buste de Juno Augusta en bas-relief qui a servi comme bloc d’angle sudest de la pièce avec ancrage (de Vos 1997, 206, pl. 23, fig. 7). Près de ce bloc avec l’inscription Iunoni Aug sac se trouvait en 1994 un autre bloc avec le buste de Mercure en basrelief (de Vos, Attoui 2011, 34, 59, fig. 6a-b). Le visage des deux divinités a été effacé intentionnellement, probablement par des chrétiens iconoclastes. Un paon regardant en arrière se dirige vers la gauche à côté du buste de Juno Augusta, Mercure est flanqué de son marsupium (à g.) et de son caduceus (à d.). Sur le petit côté sud du bloc d’ancrage on observe des empreintes du mortier de tuileau laissées par les blocs équerrés enlevés. L’ancrage est in situ, inséré dans un mur transversal, parallèle au mur périmétral à 2,77 m de distance de celui-ci. Une disposition similaire se retrouve dans les sites 205 (3,4 m), 207 (3,46 m), 210 (2,79 m) et 308 (3,23 m). Le côté supérieur du bloc d’ancrage a deux rectangles creux qui sont ciselés d’une manière différente du reste de la surface et sont destinés à loger les montants de la niche de l’arbre vertical du levier.

- Entre le torcularium et le versant de l’oued il y a un autre bâtiment difficile à identifier, comportant un gros bloc bossé ayant un canal de vidange en diagonale. Entre le torcularium et ce bâtiment-ci sont deux grands fragments de voûtes en croisée en opus caementicium. La margelle en calcaire blanc (0,70 m de côté; Ø intérieur 0,36 m) est probablement insérée dans le sommet d’une voûte d’une citerne, faisant fonction de substruction: cf. sites 21 et 329.

- Seuil d’une porte à deux gâches dans la feuillure intérieure pour les verrous verticaux des deux vantaux. Le scellement au plomb de la crapaudine est conservé; il est logé dans une mortaise carrée dans l’extrémité de la rainure dans laquelle le vantail était logé.

Église. La petite église est construite avec des éléments architecturaux remployés (trois blocs d’ancrage, une corniche moulurée, piliers cannelés et chapiteaux corinthiens) et avec des éléments de presse (trois blocs d’ancrage et un linteau avec une mortaise allongée peu profonde dans chacun des côtés longs). Elle se compose d’une salle rectangulaire (9 x 11,5 m) avec une porte à un seul vantail dans chacun des longs côtés, une abside (semi-circulaire à l’intérieur et carrée à l’extérieur, où il s’avance en saillie à 2,40 m) orientée au sud et deux chapelles situées dans les coins nord. Le seuil dans le mur ouest est pourvu d’un canal d’évacuation dans le pas. La configuration de l’abside est similaire à celle de l’église plus grande du site 282, et à celle de la ferme voisine du site 21. Les éléments architecturaux proviennent selon Carton 1895, 242 du temple sur le sommet de la colline situé à 800 m au sud (site 29). Un bloc d’ancrage dont on a essayé de tailler une colonne a été réutilisé dans le mur périmétral nord de l’église (de Vos 2008, 278, fig. 24). Une colonne et un chapiteau corinthien sont transférés en dehors du coin nord-ouest du grand torcularium. Une fouille clandestine au milieu du côté nord intérieur et extérieur de l’église a mis au jour, en 2008, des parois du mur nord en petit appareil peu régulier. La construction d’une église près des presses, également attestée dans les sites 282 et 565, s’explique par le grand intérêt ecclésiastique dans la production et la distribution d’huile qui joue un rôle important dans les œuvres de charité et dans la liturgie. Pendant l’antiquité tardive l’église s’est substituée à l’état en ce qui concerne le contrôle de la production agricole et arboricole (v. les inscriptions de sites 25 et 539). L’orientation au sud-sud-est peut dater l’église à l’époque pré-byzantine (Duval 1999, 939).

La structure au sud de l’église comporte des orthostates alignés, et dans le secteur ouest, un bloc en opus caementicium peut-être appartenant à une citerne. Dans le coin nord-ouest on observe un seuil large de 1,00 m, pourvu d’un canal d’évacuation dans le pas et d’une crapaudine pour le tourillon du vantail de la porte.

Citations site

Carton 1895, 242-3.

de Vos and Attoui 2013, 24.

de Vos and Attoui 2011, 34, 59, fig. 6ab, 34a-b.

Bibliographie

Carton, L. B. C. (1895). Découvertes épigraphiques et archéologiques faites en Tunisie (région de Dougga). Paris: Leroux. Bibtex
de Vos, M. and R. Attoui (2013). Rus Africum. Tome I: Le paysage rural antique autour de Dougga et Téboursouk: cartographie, relévés et chronologie des établissements. Bibliotheca Archaeologica, 30. Bari: Edipuglia. Bibtex
de Vos, M. and R. Attoui (2011). «Paesaggio produttivo: percezione antica e moderna. Geografia della religione: un case-study nell'Africa del Nord». In: When did Antiquity end? Archaeological case studies in three continents. Edited by: R. Attoui. International Series, 2268. BAR: Oxford, pp. 31-89. Bibtex

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